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Catégorisation d’une substance chimique inconnue

Dans de nombreux cas, un personnel peut se trouver en présence d’une substance chimique inconnue.  Ce peut être un primo-intervenant en mission lors d’une intervention dans un laboratoire de chimie à l’université (j’ai connu personnellement une telle situation !), un gestionnaire de déchets chimiques à qui on vient de signaler des vieux bidons pleins et déposés dans la nature, un opérateur judiciaire à la recherche d’une preuve ou du personnel militaire NRBC.

Que faire devant un tel produit pour l’éliminer dans les meilleures conditions ?

 

 

 

Position du problème

Identifier complètement la substance chimique nécessiterait un prélèvement et une caractérisation dans un laboratoire. Cela prend beaucoup de temps et son transport peut être risqué car le produit peut se révéler explosif, inflammable voire toxique…

On va donc « catégoriser » le produit, c’est-à-dire déterminer en quelques tests simples et, sur le terrain, ses principales caractéristiques physicochimiques permettant de prendre rapidement les mesures de sureté les plus appropriées.

Les mesures de terrain doivent être simples à pratiquer par du personnel non spécialisé en chimie, avec du matériel facile d’emploi et une procédure « étape par étape » permettant d’exécuter les manipulations dans le bon ordre.

Le produit inconnu peut être sous forme gazeuse (air, gaz, vapeur) ou bien sous forme solide ou liquide.

 

Air/gaz/vapeur

Un test très simple permet d’identifier plusieurs « TICs [1] » existant sous forme gazeuse en exposant simplement un carte détectrice Multi-Tic au gaz. Des indicateurs colorés montrent la présence éventuelle de Cyanure d’Hydrogène (HCN) , Chlorure d’Hydrogène (HCl), Fluorure d’Hydrogène (HF), Chlore, Brome, Phosgène et Ammoniac.

 

Solides et liquides

 

Test d’inflammabilité

Le point éclair est la température minimale pour laquelle la concentration des vapeurs émises est suffisante pour produire une déflagration au contact d’une flamme ou d’un point chaud dans les conditions normalisées.

On met en évidence une température minimum à laquelle l’émission de vapeurs est suffisante pour former avec l’air le mélange gazeux inflammable sous l’action extérieure d’une flamme. Ce niveau de température minimum est appelépoint éclair (ou flash point pour les Anglosaxons).
Plus le point éclair est bas, plus la substance est inflammable et donc dangereuse.

Il existe plusieurs tests de terrain reposant sur le comportement d’un échantillon à distance ou au contact d’une flamme. Ce sont des tests semi-quantitatifs très utiles sur le terrain qui nécessitent l’emploi d’un bec type bunsen sur cartouche de gaz. Ils sont réalisés avec un très petit échantillon déposé sur un fil de cuivre muni d’une boucle à son extrémité. Une petite quantité de produit est déposée et amenée près de la flamme.

Pt éclair < 40°C : extrêmement inflammable. Le produit s’enflamme à 1 cm de la flamme

Pt éclair compris entre  40°C – 60°C : inflammable. Le produit s’enflamme hors de la flamme après l’avoir touchée.

Pt éclair 60°C – 90°C : limite de l’inflammabilité ou combustible. Le produit brûle hors de la flamme après avoir maintenue un contact de 2 secondes avec elle.

Pt éclair > 90°C . Nécessite d’être dans la flamme pour brûler : combustible

Si le produit explose au contact de la flamme il est potentiellement explosif !

Pour mettre en évidence l’aspect explosif du produit on peut aussi faire le test dit « de l’épingle à cheveux ». On place l’échantillon solide de la taille d’un grain ou une goutte de liquide sur un verre de montre. On prend une épingle à cheveux dont on fait chauffer une extrémité dans la flamme du bec jusqu’à ce qu’elle soit rougie. On touche le solide ou le liquide inconnu avec l’extrémité chauffée. Lorsque le produit est explosif, il se crée un dégagement d’explosif volatile.

On peut compléter ce test par le test de Test de Beilstein.  Il consiste à porter le fil de cuivre à l’incandescence et à le mettre en contact avec l’échantillon. En présence d’halogène, la flamme se colorera en vert après avoir réintroduit le fil dans la flamme, à la suite de la formation d’un halogénure de cuivre. Nettoyer le fil de cuivre dans la flamme. Reprendre un échantillon lorsque le fil est refroidi et l’introduire à nouveau dans la flamme et observer la couleur de la flamme. L’apparition d’une couleur verte brillante indique la présence d’un produit organique contenant des halogènes (Cl, Br, I). C’est le cas par exemple du biphényl polychlorés (PCBs).

 

Recherche d’eau et comportement dans l’eau

Si l’échantillon contient de l’eau, elle sera mise en évidence par un indicateur coloré contenu sur un papier test.

La solubilité dans l’eau sera testée en introduisant une goutte de produit liquide ou l’équivalent pour un produit solide dans 1 mL d’eau. Observer tout signe de réaction : dégagement de chaleur, présence de bulles  ou de vapeurs (formation de produit toxique ou de gaz inflammable). S’il n’y a aucun signe de réaction, compléter progressivement à environ 1 gramme d’échantillon solide/1 ml d’échantillon liquide.

Si le produit est complètement dissous ou forme un gradient de densité il est soluble dans l’eau (ionique / polaire). Il peut se former un précipité insoluble dans l’eau (non polaire, gravité spécifique > 1.0). C’est le cas des hydrocarbures halogénés. Le produit non dissous peut flotter à la surface de l’eau : il est insoluble dans l’eau (non polaire, gravité spécifique inférieure à 1.0, éventuellement inflammable). C’est le cas des hydrocarbures. Il peut s’émulsifier à la façon de la crème sur du café.

 

Mesure du pH

Elle se fait au papier pH sur un échantillon liquide ou sur du solide dilué dans l’eau (à condition que le produit ne réagisse pas avec l’eau !)

Si le pH <2 ou pH> 12.5 le produit est corrosif (acide fort, base forte).

 

Propriétés oxydantes

Toujours dans le même ordre d’idée, des papiers tests contenant des indicateurs colorés mettent en évidence les oxydants, le peroxyde, les nitrates, les perchlorates.

On peut aussi rechercher les produits à base de cyanure ou de sulfure.

 

Tests supplémentaires

Test de Char

Il a pour but de déterminer s’il s’agit d’une substance organique ou inorganique.

Introduire un peu de produit solide ou liquide (testé pour ne pas être explosif !) dans un tube à essai. Chauffer le tube jusqu’à ce qu’il n’y ait plus de réaction ou jusqu’à ce que l’éprouvette fonde. Lorsque c’est un produit organique  les vapeurs qui se dégagent s’enflamment avec un briquet (exception : les hydrocarbures halogénés ne s’enflamment pas).

Dans le cas d’un produit inorganique, les vapeurs de l’espace de tête ne s’enflamment pas. L’observation de la couleur des vapeurs, de la présence ou non d’eau sur les parois du tube, d’odeurs, etc. donne aussi de précieux renseignements sur la composition du produit inconnu.

Il est aussi intéressant de tester ces vapeurs avec la carte détectrice Multi-Tic qu’on a déjà vue au début du chapitre.

 

Détection de cyanure, sulfure, huile, fluorure. Indicateurs colorés

 

Mesure de la température (à l’aide d’une caméra Infrarouge permet de déterminer par exemple, si une réaction exothermique à l’intérieur d’un container peut mener à une explosion).

 

Spectroscopy Raman

Elle permet de comparer des profils extrêmement inflammables, inflammables ou potentiellement inflammables. Elle peut donc évaluer le risque lié à la chaleur.

 

Mise en évidence de  produits chimiques de guerre à  l’aide de Papier détecteur comme  PDF-1 [2] et CALID 3 [3] (GD, HD, VX).

 

Catégorisation

 On peut ainsi catégoriser les produits explosifs, acides/basiques/oxydants (corrosifs [4]), inflammable, combustibles, dangereux en présence d’eau, oxydants, toxiques pour l’homme et l’environnement (halogénés, cyanures, sulfures…)…

Les produits gazeux dangereux sont aussi catégorisés comme HCN, HCl, HF, Chlore, Brome, Phosgène, Ammoniac.

Rapidement, sur le terrain, les mesures adéquates peuvent être prises afin de traiter les produits inconnus dans les meilleures conditions de sureté.

 

Remarques

Ces tests ne fonctionnent bien qu’avec des produits purs et ne sont donc pas adaptés aux déchets chimiques.

Comme toutes les méthodes de dépistage semi-quantitatives, il y a de nombreux faux positifs et faux négatifs mais ils sont connus et bien repérés dans le mode d’emploi.

La société Ouvry® distribue un kit permettant de caractériser les produits chimiques dangereux sur le terrain : HAZCAT [5]

 

Bibliographie

° Techniques for identifying unknown materials. Hazard Categorization. Washington State Deparment of Ecology Spill Response Section. Lacey, WA.

° A guidebook intended for use by first responders during the initial phase of a tranposrtation indicent involving dangerous goods/hazardus materials. 2016 Emergency response Guidebook. 20016 Emergency response guidebook.

° HazMat Field Screening Equipment Manual  03/13/17 California CUPA Forum.

° Mode d’emploi HAZMAT (Ouvry SAS)