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Les EPI au cours des épidémies d’Ebola

Plusieurs articles importants ont été publiés pour analyser les équipements de protection individuelle des personnels travaillant dans les centres de traitements des malades atteints d’Ebola. Ils abordent aussi les problèmes de l’inconfort de ces tenues et donc des exigences normatives liées à ce type d’équipement.

Les épidémies d’Ebola se sont apaisées et un certain nombre d’articles scientifiques font le point sur l’utilisation des EPI des personnels au contact des patients.

Sprecher Armand G et al. Peronal protective equipment for Filovirus epidemics : a call for better evidence. J. of Infect. Dis. 2015:212 (Suppl 2) Médecin sans frontières.
https://jid.oxfordjournals.org/search?submit=yes&submit=Search&pubdate_year=2015&volume=212&firstpage=&doi=&author1=sprecher&author2=&title=&andorexacttitle=and&titleabstract=&andorexacttitleabs=and&fulltext=&andorexactfulltext=and&journalcode=jinfdis%7Ccid%7Cofids&fmonth=&fyear=&tmonth=&tyear=&flag=&format=standard&hits=10&sortspec=relevance&submit=yes

Nécessité de l’EPI

Les filovirus (Ebola, Margburg) représentent l’archétype même du risque biologique. Une infime contamination cause une maladie mortelle pour laquelle il n’y a pas, jusqu’à maintenant de traitement efficace. La protection des soignants est donc rigoureusement indispensable.
Elle se traduit par le port d’une tenue de protection individuelle protégeant la tête, le visage et le corps.
A cet équipement s’ajoutent un entrainement spécifique, des unités de traitement correctement conçues et des contrôles d’accès rigoureux à la zone contaminée.

Evolution des EPI

Lors des premières épidémies, le matériel employé était celui qui était déjà sur place dans les centres de soins c’est à dire, tenues classiques, tabliers, couvre-chef, masques et gants. On y a ajouté des bottes en caoutchouc, un tablier en caoutchouc, une deuxième paire de gants et des lunettes de protection.
Avec les nouvelles épidémies, se sont ajoutées des combinaisons, puis des capuches, les masques de chirurgie ont été remplacés par des masques qui ne se plaquent pas contre le visage. Ces changements ont été imposés pour soi-disant améliorer la sécurité et pour se mettre en conformité avec la norme 14126 sur les vêtements de protection contre les agents infectieux.

Le problème

En voulant protéger le personnel des liquides infectieux, on l’a emballé dans des matériaux qui ne permettent pas les échanges gazeux. Ceci n’est pas anodin dans les pays chauds ou sévissent les épidémies. L’absence d’évaporation de la sueur ne permet pas de travailler plus de 40 minutes sous peine de provoquer des hyperthermies responsables de pertes cognitives dans un environnement particulièrement dangereux. Dans les pires des cas, ces « coups de chaud » ou stress thermiques, peuvent provoquer la mort lorsque l’établissement est mal équipé comme c’est souvent le cas de ces centres.
De plus, le changement de tenue toutes les 40 minutes impose une fourniture importante de matériel à des pays qui n’en ont pas obligatoirement les moyens, sans compter les problèmes de logistique et de déchets.

Réunion des experts

Médecins sans frontières a réuni en Avril 2014 tous les experts du domaine et les conclusions de leurs travaux ont été les suivantes :

– Les portes d’entrée des filovirus sont les muqueuses, (yeux, nez, bouche). La peau ne permet le passage que si elle n’est pas intègre.
Cela permet de séparer la protection en 2 parties à partir du cou : ce qui est au dessus doit être protégé pour empêcher le virus d’atteindre les muqueuses. En dessous du cou, la peau saine et la gravité permettant l’éloignement des fluides des muqueuses situées au dessus.

– En dessous du cou : la capacité des protections à résister à la pénétration des fluides infectieux est mesurée par leur aptitude à retenir le bactériophage Phi X 174 dans un sang synthétique sous différentes pressions (ISO 16604). Le phage Phi X 174 est un phage nu de 27 nm de diamètre dont les caractéristiques sont très éloignées de celles du filovirus qui est un virus enveloppé d’une taille approximative de 80 x 800 nm. Il est donc évident qu’un support ne permettant pas le passage du phi X 174 est très certainement bien plus résistant que nécessaire pour bloquer un filovirus. Comme le degré de résistance est inversement corrélé avec le passage des gaz, ces supports ne permettent pas le refroidissement vital de la peau.
Il se peut donc que la norme ISO 16604 soit surdimensionnée d’autant plus que, dans le passé, l’utilisation de simples tabliers chirurgicaux étaient tout à fait efficaces à la condition toutefois que la peau des soignants soit intacte et que les procédures de déshabillages soient rigoureusement respectées dans le but d’éviter le contact des virus et des muqueuse.

– Au dessus du cou : les mesures de protections sont complètement différentes. Toutes les mesures doivent être prises pour empêcher l’entrée directe des virus contenus dans les gouttelettes de toux ou par les mains contaminées. La contamination indirecte provenant du matériel contaminé ou par la gravité de la sueur atteignant les yeux doit aussi être prise en considération. Les risques d’infection par du matériel migrant sur de courtes distances vers les muqueuses sont très importants.

– Les mesures de décontaminations valables pour la partie basse ne sont pas applicables pour la partie haute. Le matériel infectieux peut migrer vers les muqueuses avant la décontamination, les cheveux ne se décontaminant pas par un simple essuyage ou lavage. La douche décontaminante peut faire migrer des virus vers les muqueuses. C’est pourquoi une protection imperméable totale de la partie supérieure au cou est indispensable tout comme une protection faciale permettant une large vision. Si la protection n’est pas d’une seule pièce, il faut un masque supplémentaire pour la bouche et le nez pour éviter une contamination involontaire par les mouvements de la main. C’est aussi pourquoi une désinfection du bas du visage est indispensable après l’enlèvement de l’EPI. Une protection totale empêchant les mouvements de transfert involontaire implique un système de ventilation en prévenant la formation de buée.

Conclusions

1- Il a été décidé de tester les EPI sur la base de la norme ISO 16604 mais en utilisant des filovirus dans un laboratoire P4. Une tenue perméable aux gaz, si elle retient les filovirus pourrait alors être utilisée ;
2- L’utilisation d’ EPI non résistants aux filovirus est argumentée par le fait que la peau saine ne laisse pas passer le virus. Comme ceci n’est pas encore prouvé il a été décidé de l’expérimenter dans un P4 avec des primates non humains. Une stratégie doit être définie pour tester les peaux non intactes (piqures d’insectes, coup de soleil, coupure du rasoir, dermatite (y compris les dermatites dues au désinfectant !) ;
3- Pour les combinaisons étanches il serait bon de tester, dans des conditions de température et d’humidité proches des pays ou sévissent les épidémies afin de déterminer exactement la durée d’utilisation en tenant compte du stress thermique (par exemple avec l’ISO 11092).

Fischer W.A et al. Personal protective equipment : protecting health care providers in an ebola outbreaks. Clin. Ther. (2015) http://dx.doi.org/10.1016/j.clinthera.2015.07.007

Cet article rappelle les principales caractéristiques de la transmission du virus Ebola et la nécessité absolue de revêtir des EPI pour créer une barrière physique entre le soignant et les liquides contaminés des patients. Il rappelle aussi qu’une personne se touche les yeux ou les lèvres à raison de 15,7 fois par heure. Les comportements de chacun doivent donc être correctement contrôlés.
Il aborde le problème des appareils respirateurs, de la problématique des 2 paires de gants et de la protection des pieds.

Il insiste particulièrement sur la nécessité des entraînements à l’habillage et au déshabillage des EPI qui peuvent être à l’origine de contaminations secondaires.

Concernant les risques induits par les EPI il cite bien évidemment le stress thermique. En revanche, pour palier à ce problème il préconise une surveillance accrue des opérateurs, l’emploi de vêtements rafraîchissants voire l’utilisation d’air conditionné. Pour réduire les conséquences d’un stress thermique le CDC recommande l’éducation des personnels soignants aux conséquences thermiques du port d’un EPI, l’augmentation progressive des temps de travail pour habituer le corps, une bonne hydratation, l’observation des signes précurseurs du stress thermique et l’observation stricte des temps de pause.

Comme on peut le voir c’est une autre façon d’aborder le problème qui parait beaucoup plus compliquée que la précédente car elle ne remet pas en cause la barrière totalement hermétique.

Edmont M.B et al. Ebola virus disease and the need for new personal protective equipment. JAMA, 2014, 312, 2495-16. http://jamanetwork.com/journals/jama/article-abstract/1920943

Dans ce papier, les auteurs imaginent l’EPI idéal. Imperméable aux liquides, couvrant la peau et les sous-vêtements, facile à mettre, facile à enlever en minimisant au maximum l’autocontamination, donnant un maximum de confort à l’utilisateur, minimisant la contamination de l’utilisateur, des travailleurs de l’environnement sans polluer l’environnement. Ceci implique la mise au point de nouveaux matériaux et designs. Quelques pistes sont données.

La polycombi

La polycombi que nous proposons peux être une solution au problème d’inconfort des EPI. Elle permet les échanges gazeux et augmente considérablement le temps de travail des opérateurs dans les conditions de chaleur et d’humidité importantes. Munie d’une cagoule elle protège très bien les parties « au dessus du cou » , les interfaces sont parfaitement contrôlées. Un masque type canard et une visière complètent la protection faciale
Lavable, on peut aussi la désinfecter ce qui réduit les coûts et les déchets.
Pour plus de renseignements, suivre ce lien.

https://www.ouvry.com/CBRNe/-sante-.html