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Projet TRANSTUN : les premiers résultats sont parus dans une revue scientifique

Cette publication récente, fait le point sur les objectifs et les résultats du projet TRANSTUN dont le point d’orgue a été un exercice réel réalisé le 9 septembre 2021 au tunnel de Bielsa-Aragnouet.  

De quoi est-il question ?

Le projet TRANSTUN [1] (TRANSnational TUNnel operational CBRN risk mitigation) a permis de créer un réseau de parties prenantes provenant de plus de 15 pays du monde entier, de rédiger un ensemble de lignes directrices opérationnelles basées sur une évaluation des risques adaptée, et d’entreprendre un exercice réel, impliquant plus de 250 primo-intervenants de France et d’Espagne, afin d’évaluer les procédures de sécurité et de sûreté, l’utilisation optimale des équipements NRBC, la connaissance des processus de décontamination et enfin d’évaluer les gains de performance et la capacité opérationnelle en mesurant le temps d’intervention et le nombre de personnel requis, en comparant les différentes technologies disponibles.

L’entreprise Ouvry® a participé pleinement à ce projet.

Les tunnels routiers

Ce sont des infrastructures très utilisées par les transports routiers mais dont l’environnement confiné [2] peut représenter un problème de sécurité critique pour les usagers en cas d’accident, y compris les accidents NRBC. Non seulement les usagers à l’intérieur de l’ouvrage peuvent être en danger mais il peut y avoir ensuite des effets sociaux et économiques affectant la zone atteinte (région ou État) en raison de la fermeture prolongée du tunnel, la fermeture d’un tronçon routier ayant toujours de très grandes répercussions. Ces effets peuvent être associés à la réduction de la mobilité des passagers et des marchandises en provoquant, par exemple, une augmentation de la durée des trajets en raison de la déviation du trafic vers d’autres itinéraires.

Il est donc nécessaire de connaître les caractéristiques techniques et organisationnelles spécifiques du tunnel concerné pour évaluer sa résilience à la suite d’un événement majeur en tenant compte de deux questions principales : i) l’exposition potentielle des usagers ; ii) les effets résultant du délai de fermeture nécessaire pour rétablir des conditions d’exploitation normales.

La gestion des urgences dans les systèmes de transport et de mobilité est un concept étroitement lié à la résilience. Dans la littérature scientifique technique, plusieurs chercheurs ont abordé la question de la résilience de l’infrastructure de transport après un événement pertinent. Il existe plusieurs définitions de la résilience, y compris celles liées au champ d’application de cette étude ; l’une d’entre elles peut être « la capacité d’une entité – par exemple, un actif, une organisation, une communauté, une région – à anticiper, résister, absorber, répondre, s’adapter et se remettre d’une perturbation ».

Étant donné que les conducteurs de véhicules conduisent plus prudemment dans les tunnels que dans les sections à l’air libre, on estime que la probabilité d’occurrence d’un accident est d’environ 50% par rapport aux sections à l’air libre, en conséquence, les principales études concernant la sécurité des tunnels routiers se concentrent généralement sur les incendies impliquant des véhicules et la libération de produits dangereux.

Le tunnel du Mont Blanc et la directive 2004/54/CE [3]

À la suite de l’accident survenu dans le tunnel du Mont Blanc en 1999, qui a fait 39 morts et causé des dommages importants à la structure du tunnel, la Communauté européenne a publié la directive 2004/54/CE concernant les exigences de sécurité minimales applicables aux tunnels faisant partie du réseau routier transeuropéen (RTE) et d’une longueur supérieure à 500 mètres.

En identifiant l’analyse des risques comme la méthode analytique pour estimer le niveau de risque de chaque tunnel, la directive demande d’identifier les réponses aux trois questions suivantes :1_l’infrastructure du tunnel pourrait-elle être affectée ? 2_ quelle est la probabilité que l’événement se produise ? 3_ quelles sont ses conséquences possibles d’un accident ?

Le projet TRANSTUN

Dans ce contexte, le projet TRANSTUN – cofinancé par le programme du Fonds pour la sécurité intérieure de l’Union européenne – représente un exemple unique de partenariat public-privé visant à accroître la capacité de réponse d’urgence en cas d’événements NRBC dans un véritable tunnel (routier) transfrontalier. Le consortium du projet est composé de partenaires d’Italie, de France, de Belgique et d’Espagne qui, entre autres, ont pu réaliser un exercice réel dans le tunnel de Bielsa-Aragnouet. Il s’agit d’un tunnel monotube et bidirectionnel de 3 070 m de long, dont 1 303 m en territoire espagnol et 1 767 m en territoire français.

L’exercice proprement dit

Plus de 250 primo-intervenants, de France et d’Espagne, ont participé à cet exercice mettant un œuvre un événement terroriste NRBC. Cinquante experts représentant 8 pays de l’UE ont assisté à l’événement en tant qu’observateurs techniques.

Les principaux objectifs de l’exercice TRANSTUN étaient les suivants :

1. Évaluer et améliorer la réponse opérationnelle des exploitants de tunnels aux événements NRBC ;

2. Mettre en œuvre et tester les procédures les mieux adaptées au risque NRBC (ventilation, évacuation, etc.) ;

3. Tester les solutions de détection CBRN ;

4. Tester les équipements de protection CBRN indispensables à une réponse appropriée.

Malgré la préparation et l’entraînement précis des équipes de secours pour intervenir dans des champs NRBC, seuls les exercices réels permettent de tester les procédures opérationnelles et de mettre en évidence les lacunes et les points critiques qui doivent être traités.

Plusieurs objectifs avaient été fixés pour la réalisation de cet exercice. Ils concernaient des tests de réponse opérationnelle à des événements chimiques : d’une part pour évaluer et améliorer les performances des solutions adoptées, et, d’autre part pour mettre en œuvre et tester les procédures les mieux adaptées pour faire face à la menace NRBC (ventilation, évacuation, etc.).

En outre, les dispositifs de détection et les équipements de protection individuelle (EPI) actuellement utilisés ont été testés afin d’évaluer leur efficacité dans le cadre d’une intervention NRBC.

Alors que la stratégie appliquée semble claire en ce qui concerne la fumée causée par les incendies, il est nécessaire de connaître à l’avance les effets de toute autre substance chimique répandue dans un milieu confiné. Il est donc essentiel en cas d’accident de connaître le plus tôt possible le type de substance(s) chimique(s) en cause afin de déterminer la procédure de décontamination la plus appropriée à mettre en œuvre.

À cet égard, l’exploitant du tunnel devrait être en mesure de reconnaître à tout moment la présence éventuelle de gaz qui ne sont pas habituellement présents dans le tunnel (tels que ceux causés par la circulation des véhicules, les polluants, etc.).

L’utilisation d’instruments de détection peut être une solution à condition de bien connaître les interactions entre les différents gaz. Des appareils plus simples, permettant par exemple de mesurer la chute du taux d’oxygène montrant indirectement la présence de gaz inhabituellement présents pourrait être une solution. L’alerte donnée indiquera aussi aux primo-intervenants qu’ils devront identifier la nature du gaz une fois arrivés sur place.

Résultats de l’exercice réel TRANSTUN

Ce sont les premiers secours français et espagnols qui sont intervenus les premiers. Parmi eux, la participation des forces de l’ordre et des pompiers a été remarquable en quantité et en qualité mais elle a souffert d’un manque de ressources en matière d’urgence médicale.

Dans un premier temps, il était important d’isoler la scène et d’identifier les différentes zones d’intervention : zone d’exclusion (hot zone), zone de décontamination (warm zone) et la zone froide (cold zone), non contaminée servant au personnel de soutien. Cela s’est fait à la sortie du tunnel, côté français.

Zones d’exclusions à la sortie du tunnel

La mesure la plus urgente a été l’extraction des victimes hors de la zone contaminée. Malgré l’absence d’ambulances et de médecin sur place, l’intervention de la gendarmerie et des pompiers a permis de sécuriser les victimes restées à l’intérieur du tunnel, en leur fournissant un masque à cagoule (appelé masque d’évacuation), et de déplacer ceux qui avaient quitté le tunnel vers un point de rassemblement dans la zone chaude afin d’y être décontaminés. Les victimes ont été triées en fonction de la gravité des symptômes, et ont reçu des équipements de protection individuelle pour certaines d’entre elles tandis que d’autres ont bénéficié de couvertures d’urgence.

Les victimes n’ont pas été décontaminées avant que le conteneur de décontamination de l’unité de lutte contre les incendies n’atteigne la zone de rassemblement à l’extérieur du tunnel et qu’il soit mis en place.

Néanmoins, même si une grande disposition des moyens et du personnel a été assurée, trois tâches spécifiques n’ont pas été correctement gérées : 1_ L’emplacement de l’abri de décontamination des brancards était mal placé car il rendait impossible l’entrée d’autres unités sur les lieux ; 2_ De nombreux blessés ont été laissés sans surveillance pendant une longue période alors qu’ils se trouvaient sur les lieux ; 3_ Plusieurs erreurs ont été enregistrées dans l’activité de décontamination comme notamment la mauvaise utilisation de la pente (tous les fluides contaminants sont allés dans la vallée en contrebas), un grand nombre de contaminations croisées (l’opérateur du dernier contrôle a touché la peau nue du sauveteur qui enlevait ses vêtements), et le fait de jeter les EPI usagés dans le baril en créant des contaminations aériennes.

D’une manière générale les EPI ont bien été utilisées par les forces tactiques ainsi que par les équipes de secours.

Les incidents chimiques se caractérisent par l’intervention de plusieurs services, tels que les forces de l’ordre, les pompiers et les intervenants médicaux d’urgence, et éventuellement les démineurs, la protection civile… Habituellement, un poste de commandement avancé (PCA) est installé sur place, d’où le commandant de l’incident (CI) gère l’urgence avec les autres représentants des services. Lors de cet exercice, ce poste de commandement n’a pas été identifié dans la zone chaude mais les opérations ont été gérées par un centre de contrôle permanent du tunnel du côté espagnol et un poste de commandement du côté français par le biais d’un camion de communication et de commandement des pompiers situé sur la route près de la tête du tunnel.

La participation de la société Ouvry

OUVRY engagé dans le projet européen TransTun destiné à faire face aux incidents chimiques survenant dans des tunnels [4]

Les équipement Ouvry à l’exercice NRBC Transtun [5]

Conclusion

Sur la base des résultats obtenus lors de la mise en œuvre d’un exercice en situation réelle aussi complexe, il est apparu immédiatement à quel point il est essentiel d’assurer l’organisation régulière d’exercices non seulement pour mettre en pratique les procédures des opérateurs de tunnels, mais aussi pour tester leurs synergies avec les primointervenants concernés.

Cet exercice a aussi permis de souligner les lacunes actuelles et ensuite de discuter de la redistribution potentielle des ressources ainsi que de la reformulation des rôles et des responsabilités fondamentales pour améliorer la capacité de réponse des multiples acteurs concernés de manière intégrée. Les résultats obtenus par TRANSTUN peuvent être considérés comme une approche opérationnelle modulaire et flexible qui peut être reproduite dans plusieurs contextes impliquant les risques NRBC et la sécurité des tunnels routiers et ferroviaires.

Bibliographie

Borghetti F., Benolli F., Micozzi A., Di Giovanni D., 2022, Transtun Project: a Public-private-partnership to Enhance the Capacity of Emergency Response in Case of Cbrn Incident in Road Tunnels, Chemical Engineering Transactions, 91, 355-360 DOI:10.3303/CET2291060