La préparation secrète d’armes NRBCe !
En avril 1979, une épidémie de charbon appelé aussi « Anthrax », a eu lieu à Sverdlosk une ville située à 1 400 km à l’Est de Moscou et dans laquelle habitaient alors 1,2 millions d’habitants. Cette épidémie eut d’importantes conséquences à la fois médicales et politiques. L’apport du diagnostic par les méthodes d’amplification de l’ADN ancien a permis d’éclaircir d’une manière rétrospective cette étrange affaire !
Les Faits
Au début de l’année 1980, la presse occidentale a relaté une épidémie de charbon (ou anthrax) s’étant déroulée à Sverdlosk, maintenant Ekaterinburg ou Yekaterinburg.
Les autorités soviétiques ont communiqué sur le fait que les personnes atteintes avaient consommé des bêtes contaminées par le bacille du charbon. Il fut dénombré 79 cas de charbons gastro-intestinaux dont 64 mortels, et 17 cas de charbon cutané au contact des animaux malades.
Dès les années 1990 d’autres articles ont montré que les scientifiques Russes se posaient des questions quant à l’origine alimentaire de ces cas d’anthrax humains.
C’est en 1991 que Boris Eltsin, qui en 1979, était responsable du parti communiste local, ordonna une enquête pour connaître l’origine exacte de la contamination.
Les premières analyses anatomopathologiques et bactériologiques
Deux médecins ont gardé dans leur collection personnelle (et en lieu sûr !) les lames d’observation microscopiques, des inclusions en paraffine ainsi que les nécropsies des patients. Quarante-deux nécropsies ont été étudiées et/ou ré-étudiées. Elles montrent toutes des nécroses hémorragiques des ganglions lymphatiques thoraciques qui drainent les poumons et des médiastinites hémorragiques. Dans 20 cas, la culture de Bacillus anthracis a été positive et dans presque tous les autres cas, le bacille a pu être observé dans les tissus atteints. Dans ces conditions, il est bien évident que la porte d’entrée du bacille du charbon était pulmonaire et non pas digestive ou cutanée comme les autorités soviétiques avaient pu l’affirmer dans un premier temps.
La localisation des personnes atteintes
L’étude épidémiologique a montré que la très grande majorité des personnes atteintes travaillaient ou habitaient dans une zone restreinte d’environ 4 kilomètres de long s’étendant d’un complexe militaire vers le Sud. Concernant les animaux, les moutons et les bovins atteints étaient répartis dans 6 villages jusqu’à une distance de 50 kilomètres et rigoureusement placés sur la prolongation de l’axe des cas humains.
Le 2 avril 1979 entre 4 heures et 19 heures, les relevés des vents de l’aéroport montrent que ces derniers soufflaient exactement dans le même axe que celui des cas humains et animaux (rappelons que les premiers cas sont apparus le 4 avril 1979).
L’analyse moléculaire
Des analyses PCR selon les techniques dites de « l’ADN ancien » réalisées en 1998 soit 19 ans après les faits sur des échantillons formolés et paraffinés ont montré les résultats suivants :
1- tous les prélèvements montrent la présence de Bacillus anthracis, souche responsable de la maladie du charbon ;
2- toutes les souches étaient virulentes et contenaient leurs 2 plasmides de pathogénicité ;
3- plusieurs patients montraient des infections mixtes avec plusieurs types de souches. Peut être avaient ils fait l’objet d’une tentative de vaccination, le vaccin soviétique de l’époque contenant plusieurs souches différentes ?
Conclusions, extensions, moralité…
Tous les éléments de cette enquête montrent que c’est un nuage biologique qui a contaminé les populations pendant la journée du 2 avril 1979. Depuis, ce nuage a été appelé « smoking gun ». Les vents ont emporté les spores de Bacillus anthracis qui ont contaminé les populations et les animaux. On a pu estimer qu’il s’était échappé dans l’atmosphère moins d’un gramme de spores sèches. On a appris par la suite que cet accident était la conséquence du remplacement malencontreux d’un filtre au niveau des tours de séchage des spores du bacille du charbon.
Dans un premier temps, les autorités soviétiques ont maquillé les données en affirmant que l’épidémie avait pour origine une épizootie du bétail. Malheureusement, la localisation pulmonaire du bacille charbonneux chez les patients ne pouvait pas étayer cette thèse
Il faut dire que l’URSS avait signé en 1972 la convention sur les armes biologiques qu’elle violait donc d’une manière manifeste.
Une organisation clandestine appelée « Biopreparat » mettait au point les armes biologiques. Les moyens étaient gigantesques : 40 centres répartis dans tout le pays dans lesquels s’activaient 55 000 scientifiques. Participaient à ce développement les ministères de la défense, de l’agriculture, de la santé, l’académie des sciences, le comité central du parti communiste et le KGB ! On sait maintenant que des tonnes de spores de B. anthracis produites par l’URSS ont été stockées dans l’île de la renaissance située dans la mer d’Aral. Avec le réchauffement de la planète, la mer d’Aral se modifie et l’île est maintenant accessible à pied…
On pourra lire l’article correspondant en suivant ce lien