L’utilisation des agents biologiques par des terroristes a été prouvée ces dernières années. Il est donc indispensable que les primo-intervenants connaissent les systèmes de détection et de diagnostic ainsi que les réponses à apporter afin de minimiser les conséquences qui peuvent se traduire par une mortalité importante.
L’utilisation des agents biologiques par des terroristes a été prouvée ces dernières années. Il est donc indispensable que les primo-intervenants…
Nature du problème
Les agents biologiques ont été largement utilisés dans l’histoire ; le cas le plus connu étant le catapultage par les Tatars, de corps pestiférés par dessus les murailles de Caffa en 1346, afin d’introduire la maladie parmi les vénitiens qui leur résistaient. En quittant la ville, ces derniers ont répandu la maladie dans toute l’Europe. Connue sous le nom de « Peste noire du moyen-âge » elle est responsable d’une exceptionnelle catastrophe humaine puisqu’elle a tué en 5 ans, 25 millions de personnes soit entre 30 et 50% de la population européenne !
En ce qui concerne les évènements récents, on retiendra, aux Etats Unis en 2001, l’envoi de lettres contenant des spores de bacilles de charbon à plusieurs personnes dont un sénateur.
C’est pourquoi les primo-intervenants – urgentistes, infirmières, pompiers, laborantins et autres personnels de santé – doivent savoir reconnaître et agir en conséquence devant ce type d’agression.
Pourquoi le bioterrorisme est une menace réelle
1- Les exemples nous montrent que des nations, des groupes ou des individus dissidents sont suffisamment motivés pour acquérir les compétences pour développer et disperser des agents biologiques ;
2- Les usines de l’ex-URSS chargées de fabriquer les armes biologiques contenant de la peste et du bacille du charbon ont « égaré » des stocks d’armes lesquels, selon les services de renseignements, ont été vendus au marché noir dans l’Europe de l’Est. De plus, les scientifiques travaillant sur ces programmes jusqu’au début des années 90 ont ensuite collaboré avec des pays comme la Corée du Nord ;
3- On peut trouver sur internet des modes d’emploi permettant de fabriquer à moindre coût des armes biologiques sophistiquées ;
4- Des individus un peu au courant des techniques biologiques pourraient développer ce type d’arme sans beaucoup de moyens ;
5- Les populations sont devenues vulnérables à un certain nombre de germes et les personnels de santé n’ont pas d’expérience ni dans le diagnostic, ni dans les soins à apporter d’urgence
Les 3 catégories d’agents
Le CDC sépare les agents biologiques en 3 catégories en fonction de leur létalité, c’est à dire leur capacité à se répandre et la sévérité de la maladie pouvant aller jusqu’à la mort.
1- Catégorie A. Ces agents sont considérés comme présentant le plus haut risque car ils se transmettent de personne à personne avec un taux de mortalité élevé provoquant un impact majeur sur la santé publique. Ce sont Bacillus anthracis donnant la maladie du charbon (aussi appelé anthrax chez les anglo-saxons), la toxine de Clostridium botulinum (botulisme), Yersinia pestis (peste), virus de la variole, Francisella tularensis (tularémie) et les virus des fièvres hémorragiques (Ebola, Lassa…).
2- Les agents de la catégorie B se répandent moins bien que les précédents, donnent des taux de morbidité et de mortalité relativement bas. On y trouve Brucella (brucellose), la toxine epsilon de Clostridium perfringens, Salmonella, E.coli O157:H7, Shigella, toutes responsables d’infections alimentaires, Burkholderia mallei (morve), B. pseudomallei (melioidose), Chlamydia psittaci (psittacose), Coxiella burnetti (fièvre Q), Ricine, Entérotoxine B de staphylocoque, Rickettsia prowazekii (typhus), virus des encéphalites virales, Vibrio cholerae (choléra).
Les agents particuliers de niveau 1
Le USDHHS (Department of Health and Human Service) et l’USDA (Department of Agriculture) ont remanié la classification précédente et définissent les agent présentant les plus grands risques dans le cas d’utilisations intentionnellement malfaisantes entraînant des maladies de masse et des effets dévastateurs sur l’économie, les infrastructures critiques et la confiance des citoyens. Ce sont les agents particuliers de niveau 1.
Leur détection, leur diagnostic et leur traitement doivent être connus des primo-intervenants
Ce sont B.anthracis, F. tularensis, Y. pestis, Brucella, B. mallei, B. pseudomallei, Virus de la variole, C. botulinum.
De plus, ces germes se trouvent dans la nature et peuvent être isolés et cultivés par n’importe quel laboratoire même sommaire.
Le pire des scenari serait de répandre ces germes par voie aérienne sur une population concentrée, une utilisation par voie digestive (alimentation ou eau) étant tout aussi possible.
La réponse à ces menaces émergentes
Il se peut que l’origine de la contamination ne soit pas connue ; alors, les cas pathologiques n’apparaissent que quelques jours voire semaines après cette contamination. Les primo-intervenants doivent détecter la menace dès les premiers cas diagnostiqués et alerter les autorités compétentes.
De 1988 à 1999, aux USA, 1099 cas ont été étudiées : 36,3 % ont été signalées par les primo-intervenants. De plus, 44 cas ont été identifiés comme étant potentiellement d’origine terroriste dont 6 résultants d’actes délibérés. Il a fallu en moyenne 26 jours entre le contact avec l’agent pathogène et le moment les cas ont été déclarés comme inexpliqués aux autorités.
Pour réduire ce temps pendant lequel des contacts contagieux peuvent avoir lieu avec le patient atteint, il faut bien évidemment préparer les différents intervenants par des entrainements, des séminaires, des cours et autres conférences. Il faut aussi développer des plans d’actions coordonnant les différents acteurs de la santé et de la sécurité, multiplier les détecteurs environnementaux…
Les primo-intervenants devraient connaître les différents signes cliniques de ces germes particuliers de niveau 1, connaître aussi les contremesures médicales pour traiter les cas confirmés et faire de la prophylaxie pour les cas suspectés, utiliser les vaccins disponibles et surtout connaître les procédures pour alerter rapidement les autorités compétentes. Cette première ligne de défense est fondamentale et peut permettre d’enrayer rapidement la contamination de milliers de personnes.
Conclusion
La menace biologique terroriste n’a jamais été autant d’actualité. Bien que la préparation soit la meilleure approche il est pratiquement impossible et couteux de la réaliser à l’échelle de la population. De plus, les industries pharmaceutiques privées n’ont pas grand intérêt à développer des mesures prophylactiques contre les agents du bioterrorisme. C’est pourquoi tout se joue sur les primo-intervenants qui doivent, eux, être en mesure de détecter, appliquer les premières contremesures et alerter les autorités.
On trouvera l’article de S.S Madad en suivant le lien suivant :
http://omicsonline.org/open-access/bioterrorism-an-emerging-global-health-threat.pdf