L’importance de l’hydratation
L’eau est indispensable à la vie !
Au même titre que l’air, l’eau est un élément primordial à la vie.
L’eau représente 60 % de notre poids, soit environ 40 litres pour un individu de 70 kg (avec des différences liées au sexe, à l’âge et à la masse grasse). Nos milliards de cellules contiennent les deux tiers de l’eau de notre corps. L’eau est aussi le véhicule des éléments figurés du sang, ainsi que celui de certaines sécrétions (larmes, sucs digestifs).
Elle est nécessaire au maintien de la température (transpiration) et à l’élimination des déchets solubles (urine). On ne peut s’en priver plus de cinq jours. Une perte de 10 à 15 % d’eau corporelle peut entraîner la mort.
On comprend donc combien notre organisme en est intimement dépendant.
Les besoins en eau
Le fonctionnement normal du corps conduit donc à la perte d’environ 3 litres par jour du fait de :
- La respiration (0,5 L/jour) (en cas d’effort intense : 1-1,5L/j)
- La transpiration : 0,9 L/jour (en cas d’exposition à la chaleur et/ou d’effort intense : 1-2 L/heure)
- L’urine (1,5 L/jour)
- Les selles (0,1 L/jour)
L’augmentation de la transpiration lors d’une exposition à la chaleur ou pendant un effort conduit à perdre davantage d’eau.
Il convient d’équilibrer ces pertes par des apports équivalents en boisson et aliments.
La déshydratation
La déshydratation traduit un manque d’eau : soit par manque d’apport hydrique et de sels minéraux, soit par perte excessive. Parfois, les deux causes peuvent être associées : ceci renforce la gravité de la situation.
Ce décalage entre « offre » et « demande » peut résulter :
- D’une insuffisance d’apport : lorsqu’une personne ne boit pas ou ne mange pas suffisamment ;
- D’une augmentation des pertes : fortes chaleurs, efforts prolongés (transpiration excessive) notamment en plein soleil, épisodes infectieux (fièvre, diarrhée, vomissements…), brûlures importantes…
- De l’action de certains médicaments (diurétiques notamment) très utilisés dans le traitement de l’insuffisance cardiaque,
- D’une prise excessive d’alcool.
Des âges sensibles : enfants et personnes âgées
Le risque de déshydratation concerne tout le monde. Il n’existe aucun facteur protégeant un sujet de ce risque. Toutefois, les âges « extrêmes » de la vie demandent une attention particulière :
Les nourrissons sont particulièrement sensibles à la déshydratation. L’évolution peut être très rapidement fatale. Cela est dû à leur incapacité à communiquer et à s’hydrater seuls, d’une part, et à l’immaturité de leur système de régulation hydro-électrolytique, d’autre part.
Les personnes âgées perdent au fil des années la sensation de soif et ont parfois des traitements susceptibles d’aggraver le risque. Ces derniers doivent également faire l’objet d’une importante surveillance lors de situations à risque (canicule par exemple).
Déshydratation et qualité des échanges thermiques corporels
En cas d’exposition à la chaleur et/ou d’effort intense, la transpiration est très abondante pour maintenir la température corporelle en dessous de 38°C. Ceci entraîne une déshydratation d’autant plus importante qu’il fait chaud. La quantité de sueur peut atteindre 2 L/h et entraîne avec elle une quantité de sel de 0,5 à 3 g/L.
La transpiration, du fait de l’évaporation de la sueur à la surface de la peau, est le moyen le plus efficace de perdre de la chaleur. Ainsi la sudation est effective en terme de perte de chaleur si la sueur peut s’évaporer, c’est-à-dire si elle ne ruisselle pas, si elle n’est pas épongée et si l’air ambiant n’est pas saturé en vapeur d’eau. S’asperger d’eau permet aussi d’évaporer sans perdre de l’eau.
En s’évaporant, la transpiration doit maintenir notre température. Mais ce thermostat naturel ne fonctionne qu’à deux conditions : boire suffisamment pour compenser nos pertes en eau et maintenir la concentration en sels.
Les conséquences de la déshydratation
Si la perte d’eau corporelle est inférieure à 1 %, aucun effet n’est observé ; si elle atteint 2 %, la soif apparaît et la capacité physique est altérée ; si elle est aux environ de 4 %, une soif intense est perçue et les capacités physiques et mentales sont dégradées (risque de diminution des fonctions cognitives (vigilance, lucidité)) ; si elle dépasse 5 %, des difficultés de concentration, des maux de tête et un épuisement physique (crampes…) se produisent ; enfin si le déficit est plus grand que 6 %, il y a danger de confusion mentale. Quand on atteint 15 % c’est le coma pouvant conduire à la mort.
Des contextes professionnels à risque de déshydratation
De nombreux métiers exposent les travailleurs à des températures contraignantes chaudes (travaux en intérieur : blanchisseries, cuisines, mines, hauts fourneaux… travailleurs en extérieur potentiellement exposés aux fortes chaleurs : bâtiment, travaux publics, travaux agricoles…).
En période estivale, les effets de fortes chaleurs combinés à ceux des machines, produits ou procédés de travail dégageant de la chaleur, au port d’EPI contraignants empêchant l’évaporation de la sueur, voire à une activité physique intense augmentent le risque de déshydratation.
Et pour les militaires ?
L’armée américaine a estimé les besoins en eau de boisson du soldat à 3 à 4L par jour sans excéder 12L par jour (1,5L/h) environ selon son activité, les contraintes environnementales et le port d’EPI (cf tableau ci-dessous).
L’U.S. Army Research Institute of Environmental Medicine (USARIEM) a développé une application mobile Soldier Water Estimation Tool (SWET) pour aider à prédire les besoins en eau potable sur la base de 5 critères : niveau d’activité (3 niveaux : facile, modéré, difficile), tenue, couverture nuageuse, température, humidité relative.
Et pour les militaires en ambiance NRBC ?
Les Risques sanitaires liés à la déshydratation en ambiance NRBC sont décrits dans le PIA-3.8.2_MCO-NRBC (2008) dont la rédaction s’est appuyée sur des essais de terrain (CAPOPS).
Par nature, l’équipement de protection NRBC est imperméable à la pénétration d’agents extérieurs. Le personnel équipé se trouve ainsi placé dans un environnement limitant fortement l’évaporation de la sueur et par là même la thermo-régulation qu’elle autorise en temps normal (sauf dans le cas d’emploi d’EPI perméables à l’air tout en filtrant les toxiques).
Le stress thermique qui en résulte, même s’il est aussi fonction d’autres facteurs (humidité, rayonnement solaire, charge de travail, …) va rapidement provoquer des effets nocifs. En particulier, la réalisation d’un travail physique va provoquer une production de chaleur qui ne pourra être dissipée et fera courir un risque d’hyperthermie, puis de coup de chaleur, même dans des conditions de température modérées.
En environnement chaud (températures ambiantes élevées, chaleur radiante due au rayonnement solaire ou aux sols sableux et caillouteux, etc…), ces effets sont encore aggravés. En effet, la chaleur s’accumule et ne peut plus être éliminée, la température corporelle s’élève en permanence, les pertes de sueur deviennent majeures (jusqu’à 2 litres par heure).
Dans le même temps, le port du masque de protection et la limitation du volume d’eau emporté par le combattant obèrent considérablement ses capacités à se réhydrater.
Par ailleurs, l’équipement de protection exige un commandement plus actif et énergique. Ce surcroît d’activité provoque une surcharge thermique considérable et conduit à un épuisement prématuré, et à des risques « tactiques ».
Enfin, certains médicaments spécifiques de l’environnement NRBC (pyridostigmine, atropine) ont des effets secondaires aggravants en environnement chaud.
Ainsi, les conditions réelles de combat peuvent-elles aboutir à des pertes humaines très rapides (moins d’une heure dans certaines conditions), dues principalement à la déshydratation et à l’élévation excessive de la température corporelle.
Pour des températures d’air de 35 à 40°C mesurées sous abri, la durée maximale de tolérance sous protection individuelle NRBC de niveau 4, pour tout personnel réalisant un travail physique, même d’intensité modérée et moyenne, a été estimée à 2 heures.
Les besoins en eau du militaire portant des EPI-NRBC sont donc très importants et par conséquent, la prise en compte de son hydratation est prépondérante. De plus, il est conseillé de boire toutes les 15 min lors d’efforts plutôt que beaucoup en 1 seule fois et plus rarement, ce qui renforce la nécessité de pouvoir s’hydrater en milieu NRBC.
Les solutions face au risque de déshydratation
La prévention
Il s’agit d’agir sur l’organisation du travail (fréquence des pauses, limitation du travail physique, rotation des tâches…), les matériels et équipements.
Pour les militaires, la prévention passe par la formation et l’information préalables, une acclimatation à la chaleur par une préparation physique, et la mise en œuvre d’une bonne hygiène de vie. En particulier, l’hydratation doit être abondante et régulière (apprendre à boire), et un apport supplémentaire de sel doit être procuré pendant les repas ou dans la boisson de réhydratation (2 sachets de 1 g de sel dans une bouteille de 1,5 litre).
Par ailleurs, une alimentation équilibrée et variée, en salant un peu plus les aliments, permet de compenser les dépenses énergétiques et en sels minéraux.
La consommation d’alcool est à proscrire, le respect des heures de sommeil est capital et l’hygiène corporelle doit être optimisée.
Adapter l’hydratation pour les militaires en ambiance NRBC
En EPI de niveau 4 à la chaleur, l’hydratation au travers du masque de protection doit être régulière (toutes les 15 minutes) et abondante. Pour des températures d’air de 30 à 40° C, les quantités recommandées sont :
- 1,5 litre par heure pour des missions dynamiques (éclairer, reconnaître, combattre, …) ;
- 1 litre par heure pour des missions plus statiques (observer, surveiller, …) ;
NB : la récupération physique passe par une récupération de l’équilibre hydrominéral de l’organisme qui peut être obtenu par :
- Un apport en eau qui doit dépendre du niveau de déshydratation constaté en fin de mission et qui doit représenter une fois et demie la perte de poids (3 litres pour 2 kg perdus par exemple). Il doit être réparti sur une période de trois heures, au repos, si possible dans un endroit frais.
- Un apport en sel qui doit viser à compenser ce qui a été perdu du fait de l’abondante sudation. Il doit être au moins de 5 grammes et proposé à la fois dans la boisson et dans l’alimentation.
Comment boire en ambiance NRBC ?
Des systèmes d’hydratation ont été développés pour être utilisés en ambiance NRBC : imperméables à une exposition aux agents NRBC, résistants, de port non contraignant, compatibles avec le port d’une protection des voies respiratoires et du visage, permettant de poursuivre une mission sans interruption c’est-à-dire pouvoir boire avec les mains libres et en situation dynamique (en mouvement)… l’OTAN a rédigé la norme AEP-4810 de Juin 2021 « On-the-move CBRN Proof Hydration System » qui donne des recommandations pour le développement de tels systèmes. Bien regarder les données techniques des fournisseurs pour déterminer leur conformité à cette norme.
Des tests de terrain permettent d’en valider les performances.