L’élément constitutif d’une tenue de type 3 est un polymère complètement étanche apparemment très protecteur. Mais qu’en est-il du comportement de la tenue complète dans des conditions d’exercice ? Quels sont les avantages d’une tenue filtrante portée dans ces mêmes conditions ?
Les tenues de protection peuvent être constituées de polymères étanches ou de textile respirant. Cet article compare les capacités fonctionnelles de ces 2 solutions.
Les tenues de protection contre les risques chimiques sont classées en fonction du niveau de protection qu’elles apportent. Lorsque l’ypérite est apparue sur les champs de bataille de la première guerre mondiale, des tenues étanches constituées de toile cirée ont été mises au point afin d’empêcher le produit toxique d’atteindre la peau. Des versions plus récentes ont été utilisées comme par exemple dans l’ex bloc soviétique en caoutchouc butyle.
Le concept dit « étanche »
Actuellement, les combinaisons étanches sont principalement fabriquées à base de polyéthylène. Ces vêtements de protection répondent aux critères de « type 3 ». La matière complètement étanche ne laisse passer ni les liquides, ni les gaz. C’est apparemment très rassurant mais c’est sans tenir compte de deux aspects fondamentaux limitant, généralement moins évoqués :
– une tenue est composée du tissu mais aussi de coutures et d’interfaces,
– une tenue est revêtue par un individu dont les constantes physiologiques doivent être respectées, en particulier sa température corporelle et son hydratation. La notion de confort doit aussi être prise en compte (confort corporel, confort sensoriel, confort dans l’application de la tâche…)
Le concept dit « filtrant »
Il se caractérise par sa perméabilité à l’air. Il met en œuvre deux couches de textile dont une doublure filtrante capable d’adsorber les toxiques. Ce complexe permet l’évacuation de la sueur et de la chaleur et donc une meilleure thermorégulation. Nous rappelons ici que la sueur pour s’évaporer tire son énergie de la peau qui se refroidit, agissant positivement sur la régulation de la température corporelle.
C’est dans ce contexte que nous avons voulu comparer ces 2 concepts, non plus au niveau des constituants élémentaires mais au niveau du vêtement entier, dans les conditions réelles d’utilisation. Les résultats obtenus avec une tenue étanche ont été comparés avec ceux d’une combinaison NRBC filtrante dans des conditions opérationnelles.
Matériels et méthodes
Une tenue de type 3 imperméable a été comparée à une tenue filtrante Polycombi© de chez Ouvry SAS dont la structure est schématisée en figure 1.
Figure 1 : schéma du complexe de textiles filtrants
Le méthylsalicylate à une concentration de 65 mg.m-3 a été utilisé comme simulant de l’ypérite. Pour mesurer la perméation c’est la méthode SD liquide qui a été employée. Quant aux tests physiologiques en conditions opérationnelles, nous avons utilisé le protocole US MIST (Man in Simulant Test).
Trente dosimètres passifs ont été positionnés sur des individus, sous la tenue, selon le positionnement décrit dans la figure 2. Ils mesurent les doses pénétrantes du simulant au niveau de 8 parties du corps :
1- nuque,
2- arrière épaules/nuque,
3- avant épaules,
4- corps,
5- avant-bras,
6- haut des jambes,
7- bas des jambes à l’avant,
8- bas des jambes à l’arrière.
Toutes les interfaces (capuches, gants, pieds) ont été fermées avec un adhésif (tarlatane).
Les sujets ont répété 80 gestes élémentaires identifiés en opération (figure 3), pendant 1 heure dans un caisson simulant un vent de 1m.sec-1.
Fig.2 Positionnement des 30 dosimètres passifs
Figure 3 : 80 gestes élémentaires représentatifs de l’activité opérationnelle
Résultats
a) Test de perméation
Textile imperméable type 3 0 µg.cm-2 pendant 24 heures
Combinaison filtrante 0,1 à 0,5 µg.cm-2 pendant 24 heures
b) Tests physiologiques sur équipement porté
Pénétration moyenne combinaison type 3 408 mg.min.m-3
Pénétration moyenne combinaison filtrante 18 mg.min.m-3
Résultats détaillés en fonction des parties du corps du passage du simulant.
Interprétation
Les tests in vitro nous montrent que la matière constituant la combinaison type 3 ne laisse passer aucune substance tandis qu’une faible quantité de liquide traverse le textile filtrant en 24 heures. Ces résultats sont tout à fait conformes aux résultats attendus.
En ce qui concerne les tests in situ, les doses pénétrantes moyennes de 408 mg.min.m-3 sont donc approximativement 20 fois plus importantes que celles des tenues filtrantes qui ne sont que de 18 mg.min.m-3. Ces résultats, totalement en contradiction avec le comportement apparent des matières constitutives des tenues peut s’expliquer par l’effet dit : « de pompage ». Les appels d’air sous l’effet de la dépression induite lors des mouvements brusques sont inévitables et sensiblement accrus lorsque la tenue est étanche : en effet, l’air va entrer avec des vitesses de passage importante au niveau au niveau des interfaces mal gérées ou d’autres orifices faits accidentellement ou volontairement. Les points de passage critiques sont les avant-bras, l’entre-jambe et le cou.
Dans le cas des tenues filtrantes, l’effet de pompage est moindre car l’air pénètre uniformément sur toute la surface du textile constitutif de l’équipement (environ 3m2), la dépression interne est donc moindre et la vitesse locale du flux gazeux est réduite. De plus, toute cette surface étant constituée d’une doublure interne carbonée elle est en mesure de ré-adsorber les produits toxiques plus rapidement que la peau (les différences d’enthalpie d’adsorption de la doublure filtrante et de la peau sont favorables au textile)
Conclusion
Non seulement les tenues NRBC filtrantes protègent mieux que les tenues de type 3 mais elles sont physiologiquement plus tolérantes et robustes (http://www.ouvry.com/CBRNe/textiles-a-usage-technique-no59.html). Les solutions filtrantes présentent donc le meilleur compromis protection/mobilité/robustesse permettant de diminuer les rotations de personnels et le nombre de tenues nécessaires dans la montée en puissance d’un dispositif de secours.
La Polycombi® filtrante d’Ouvry protège également contre des projections liquides de produits chimiques, bien utile pour la prise en charge de victimes invalides.
Pour des missions de reconnaissance ou des situations mettant en œuvre de grandes quantités de liquide, les scaphandres de type 1 restent incontournables.
Ces résultats sont extraits du rapport TNO 06DV4/1031/17736/brap,
http://www.ouvry.com/-Sante-.html