La peur et l’angoisse consécutives à des évènements NRBCe peuvent avoir des conséquences dramatiques : dans l’inconscient collectif elles peuvent mener à des mouvements de panique eux même générateurs de grands dangers comme les mouvements de foule. Un article récemment paru analyse l’état de stress post- traumatique (ESPT), les phénomènes psychosomatiques et les conséquences sociales de tels évènements.
Les attentats comme ceux qui se sont déroulés à Paris au mois de novembre 2015 induisent un état de stress post-traumatique pouvant persister longtemps après la guérison des blessure physiques et pouvant avoir des conséquences anxiogènes et sociales importantes.
A Paris, dans la nuit du 13 Novembre 2015, une série de fusillades et d’attentats coordonnés ont provoqué la mort de 130 personnes et en ont blessé 367 autres.
Dans la matinée du 2 décembre, il y eut 14 morts et 21 blessés lors d’une fusillade à San Bernardino, en Californie. Les exemples de cet ordre sont de plus en plus nombreux.
Les pertes physiques pour autant qu’elles soient irrémédiables, sont toujours accompagnées de séquelles sociales et psychologiques d’un abord moins accessible sur les individus, les groupes et la société toute entière. L’ensemble constitue une formidable menace à long terme qui continuera d’influer sur les personnes touchées et les communautés pour les années à venir.
Pour chaque perte physique d’une attaque terroriste, on estime qu’il y a entre quatre et cinquante fois plus de personnes victimes de stress aigu et de traumatisme psychologique. Une étude a révélé qu’après les attaques du 11 Septembre 2001 à New York, les musulmans américains ont été « doublement traumatisés » ; d’abord par les attaques elles-mêmes, et plus tard par le harcèlement dont ils ont fait l’objet et qui ont conduit à taux de dépression et d’anxiété supérieurs à ceux de la population générale et même à ceux les minorités.
L’état de stress post traumatique (ESPT) affecte généralement de 30 à 40 % (taux de prévalence) des personnes directement impliquées. Après les attaques de 11 septembre 2001, 35% des personnes se trouvan, soit dans le World Trade Center lui-même, soit dans un rayon d’un bloc, ont développé un ESPT dans 4 années qui ont suivi. Dans le grande majorité des cas, l’incidence augmente pour atteindre son maximum 2 semaines après l’évènement puis diminue rapidement, la majorité des personnes voyant leurs symptômes disparaitre sans même l’intervention d’un professionnel de santé mentale. Dans les deux mois après une attaque, la plupart des études montre une taux d’ESPT inférieur à 3%. Cependant, en ce qui concerne les attaques du 11 septembre on a constaté que six mois après, 5,3% des résidents de la ville de New York présentaient encore un ESPT.
L’ augmentation de l’anxiété à la suite des menaces terroristes et des attaques peut donner lieu à des épidémies de syndrome psychogène à grande échelle.
Le 20 Mars 1995 l’attentat au gaz sarin dans le métro de Tokyo a fait 12 morts et 62 blessés graves. Parmi les 5 081 personnes qui ont reçu des soins médicaux près de 80% sont ressortis le jour même de l’hôpital en présentant néanmoins des symptômes d’anxiété aiguë (difficulté à respirer, maux de tête, nausées et un pouls rapide) : leur réaction était d’ordre psychique et non consécutive à une exposition au gaz sarin. Dans un contexte d’attaque chimique ou de menace, les incidents psychiques peuvent intervenir ne serait-ce qu’en présence d’une odeur inconnue persistante.
Si la libération d’une « bombe sale » pourrait causer des pertes humaines et économiques importantes, la plus grande menace se situe en fait dans les retombées psychologiques qu’elle pourrait engendrer. Le meilleur exemple est donné par l’événement qui s’est déroulé à Goiania, au Brésil en 1987. Une contamination radioactive de l’environnement au Césium-137 s’est produite après qu’un appareil de radiologie ait été volé, démantelé et vendu à la ferraille, provoquant la mort de 4 personnes et la contamination de 249 autres. Cependant, parmi les 125 800 personnes qui ont été passées au détecteur de rayon, 8,3% soit plus de 10 000 ont présenté des symptômes psychosomatiques compatibles avec une exposition aux rayons y compris, vomissements, éruptions visage et du cou et diarrhée. On en déduit que pour 1 personne réellement contaminée, 40 ont présenté les symptômes caractéristiques !
Plusieurs cas de panique de masse impliquant des mouvements de fuite chaotique ont été signalés dans Paris depuis les attaques de novembre. Or on sait combien ces mouvements de foule sont dangereux dans des milieux restreints avec des sorties de secours limitées. Dans la nuit du 17 Février 2003, un agent de sécurité à la discothèque E2 de Chicago a été contraint d’utiliser du gaz poivré pour maîtriser les clients indisciplinés. Les attentats du 11 septembre encore très présents dans leur esprit les ont mené à croire à une attaque chimique et le mouvement de panique qui a suivi a provoqué la mort par asphyxie de 21 personnes.
Socialement parlant, ces attentats provoquent l’apparition de bouc-émissaires. Dans le cas des évènements de Paris, l’islamophobie diffuse assimile les musulmans au terrorisme. Ces mouvements de panique morale sont des réponses exagérées de la société à une menace réelle ou perçue dans laquelle les médias ne sont pas sans responsabilité. Dans le cas de Daech et et de l’Islam, la peur du public est disproportionnée par rapport à la menace. Il y a environ 1,68 milliard de musulmans constituant 23,2% de la population mondiale ; on estime qu’il y a environ 31.000 militants extrémistes djihadistes. Le risque d’une personne de devenir victime physique d’une attaque terroriste est donc extrêmement faible.
Les professionnels de la santé sont dans une position unique pour aider à guérir les blessures des attaques terroristes. Ils doivent être conscients du fait que la majorité des victimes sont avant tout des victimes psychologiques persistant parfois très longtemps après la guérison des blessures physiques.
Robert E Bartholomew, The Paris terror attacks, mental health and the spectre of fear, Journal of the Royal Society of Medicine ; 2016, Vol. 109(1) 4–5, DOI : 10.1177/0141076815625070.
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