Quels sont les produits les plus actifs pour inactiver les TICs ou les simulants de produits chimiques de guerre dans le cas de la décontamination des tenues avant déshabillage ?
Les auteurs de cet article à paraître ont testé dans des conditions de laboratoire, différents produits de décontamination vis-à-vis de plusieurs produits chimiques contaminants déposés sur des supports de différentes natures simulant des EPI.
Faits marquants
Les auteurs de cet article, Lukas Oudejans et al., ont mesuré in vitro l’effet « neutralisant » stricto sensu de différents produits vis-à-vis de différents TICs et autres simulants de produits chimiques de guerre déposés sur des supports de même nature que les EPI.
Le protocole choisi mesure bien la neutralisation du produit chimique pour le distinguer de l’effet déplacement qui a lieu en milieu liquide dans la chaine de décontamination.
Les différents produits
Les contaminants
précurseurs : nitrobenzène, phénol
pesticides : carbaryl, chlordane, malathion
simulants : malathion (Vx), 2-CEES (ypérite)
Les supports
butyl, néoprène, Viton(R), nitrile (gants et bottes)
polyéthylène, acrylique, acier inox (simulant sacs en plastique et conteneurs)
Les solutions décontaminantes
eau + détergent
eau de Javel concentrée (8% Hypochlorite de sodium)
eau de Javel diluée au 1/10
eau de Javel + acide actétique
DF200 en solution
DF200 en mousse
Steriplex(R) ultra
Protocole expérimental
Les supports ont été découpés en coupons de 1,5 x 4 cm.
Une goutte de 20 µL a été déposée sur cette surface de 6 cm2 ce qui correspond à des concentrations comprises entre 3,3 g/m2 et 40 g/m2 en fonction de la concentration initiale des produits.
Après 30 minutes de contact entre le contaminant et le support, la décontamination a été réalisée au moyen d’un spray d’un volume de 100 µL projeté sur le contaminant.
Le temps d’action du décontaminant a été fixé à 2 minutes.
L’extraction des produits chimiques dans les différents solvants en fonction des produits et des supports a alors été réalisée et les décontaminants ont été neutralisés.
Les méthodes analytiques ont été adaptées en fonction des produits à doser (GC/MS pour le malathion, le carbaryl et le 2-CCES, GC/FID pour nitrobenzène et phénol, GC/ECD pour chlordane).
Toute un série de témoins valident le protocole expérimental.
Résultats
Malathion : seules l’eau de Javel concentrée présente une activité significative de 60%.
Carbaryl : les solutions les plus efficaces sont le DF200 liquide et sous forme de mousse avec des % respectifs de 47 et 64. La forme mousse est plus active sur l’acrylique, l’acier inox et le Viton tandis que le liquide est meilleur sur le support nitrile.
2-CEES : aucune solution ne dépasse 50 % d’activité, la grande majorité d’entre elles ne dépassent pas 30 %.
Nitrobenzène, phénol et chlordane ne sont sérieusement décontaminés par aucune solution testée.
Comme on pourra le remarquer, les efficacités sont très modérées, voire mauvaises. Ceci peut s’expliquer par le temps d’action qui a été choisi à 2 minutes qui représente le temps de contact estimé entre le contaminant et le décontaminant dans les conditions de la décontamination approfondie.
La solution la plus active est l’eau de javel concentrée, utilisée pour la décontamination d’un grand nombre de surfaces. Cependant, dans ce contexte, les taux d’efficacité sont très nettement inférieurs à ceux obtenus avec des temps d’action plus long de l’ordre de 30 à 60 minutes.
L’impact de la nature du support est ici tout à fait négligeable.
On remarquera aussi ici que l’eau de Javel diluée, couramment utilisée pour la décontamination approfondie semble n’avoir qu’une action très réduite.
Conclusion
Introduire un décontaminant dans le produit de la chaine de décontamination humide n’est peut être pas utile pour d’éviter les décontamination secondaires et croisées pendant le déshabillage de EPI.
En revanche, dans le but de rétablir la stœchiométrie entre le contaminant et le décontaminant, une décontamination sèche, pourrait peut-être utile avant la décontamination humide ?